Commentaire de la continuité sublime – ch.4

Commentaire de la continuité sublime – ch.4

 

Chapitre 4: L’activité éveillée

 

Ce qui précède conclut l’explication des qualités du Bouddha immaculé : il nous faut maintenant présenter les actes du Vainqueur qui en découlent.
En bref, ces actes se manifestent selon deux modes : spontané et ininterrompu. C’est pourquoi il y a une stance concernant la spontanéité et la continuité des actes du Bouddha :

[Spontanéité et continuité]

1
Selon l’état du disciple, les méthodes d’apprentissages,
Les progrès du disciple, [en accord] avec ses dispositions,
Selon le lieu et l’époque,
Toujours l’omniprésent se manifeste spontanément.

2
Dotée des précieuses et suprêmes qualités, des eaux de l’océan de sagesse primordiale, de la lumière du soleil des bienfaits et de sagesse primordiale,
La bouddhéité, l’accomplissement définitif de tous les véhicules qui pénètre le vaste espace sans milieu ni limites,
Voit indifféremment en tous les êtres son trésor de qualités immaculées,
Et disperse au vent de la compassion des bouddhas l’amas nuageux [des voiles] des passions et de la cognition.

On connaitra le sens résumé de ces deux stances, par deux et huit stances, respectivement.

3
Pour qui ? Comment ? Quelle éducation ?
Où et quand ?
Puisqu’en lui ces pensées ne naissent pas,
Le Puissant oeuvre toujours spontanément.

4
Qui : la disposition du disciple ;
Comment : par les nombreuses méthodes ;
Quelle éducation : celle qui discipline ;
Où et quand : les lieux et les moments d’enseignement.

5
[Il oeuvre sans fin] car il ne conçoit pas
La sortie définitive, son support
Les détenteurs du fruit,
Les voiles, et les conditions qui les tranchent.

6
La libération définitive, ce sont les dix terres ;
La double accumulation en est la cause ;
Le fruit est le suprême éveil,
Les êtres éveillés en sont les détenteurs;

7
Leurs voiles sont les passions,
Les perturbations secondaires et leurs imprègnations;
La condition qui les détruit toujours
Est la grande compassion.

8
Ces six points seront connus dans l’ordre
Comme semblables à l’océan,
Au soleil, à l’espace, à un trésor,
Aux nuages et au vent.

9
Puisqu’elles possèdent l’eau de la connaissance et les précieuses qualités,
Les terres ressemblent à l’océan.
Puisqu’elles soutiennent tous les êtres,
Les deux accumulations ressemblent au soleil.

10
Parce qu’il est dépourvu de centre et de périphérie,
L’éveil ressemble à l’élément espace.
Puisque sa vraie nature est la bouddhéité parfaite,
L’élément des vivants ressemble à un trésor.

11
Adventices, enveloppantes, sans existence établie,
Les passions ressemblent aux couches nuageuses.
Puisqu’elle demeure et disperse la souffrance,
La compassion est comme un vent irrésistible.

12
Puisqu’il est à jamais libéré pour le [bien] d’autrui,
Puisqu’il voit les vivants comme lui-même,
Puisque son œuvre n’est pas achevée,
Ses actes ne cessent pas tant que dure le cycle.

Il est dit que de la bouddhéité qu’elle se distingue par son absence d’origine et de cessation. Mais alors, comment de cette bouddhéité au caractère inconditionné, non engagée, les actes non conçus du Bouddha peuvent-ils se manifester spontanément et continûment, aussi longtemps que le monde existe ?

Afin de produire l’aspiration au domaine inconcevable du Bouddha chez ceux qui hésitent et doutent de sa nature grandiose, une stance vient illustrer sa magnanimité.

[Les analogies]

13
Le Tathagata est tel Indra, le tambour, les nuages, Brahma,
Le soleil, un précieux joyau,
L’écho,
L’espace et la terre.

On connaîtra dans l’ordre l’explication détaillée et la classification des stances qui suivent selon le [Soutra de l’Ornement des apparences de la sagesse première qui pénètre les domaines de tous les bouddhas].

[Indra]

« Une apparence semblable à celle d’Indra » :

14
Si la surface de la terre
Avait la nature d’un lapis-lazuli immaculé,

15
De cette pureté apparaîtraient le roi des dieux,
Sa suite de jeunes déesses,
Le magnifique [palais] Vaijayanta,
D’autres séjours divins
D’une infinie variété,
Et de multiples objets célestes.

16
A la vue de ces apparitions,
Hommes et femmes sur cette terre

17
Formeraient ce souhait :
« Puissé-je aussi avant longtemps,
Ressembler au monarque des dieux »,
Et à seule fin d’y parvenir,
Adopteraient la vertu authentique
Et s’y tiendraient.

18
« Ce n’est qu’une apparence ! »,
Mais ne le sachant pas,
Par leurs actes vertueux, ils quitteraient la terre,
Renaîtraient au royaume des dieux.

19
Cette apparition
Sans élaboration ni même un mouvement,
Sur la terre cependant,
Donnerait lieu à d’immenses bienfaits.

20
De même, ceux qui de plus possèdent la foi immaculée,
Qui l’ont cultivé avec d’autres qualités,
21
Verront en leur esprit l’image du Bouddha,
Portant les marques majeures et mineures,
22
Marchant, se levant, assis ou couché,
Agissant de multiples façons,
Expliquant l’enseignement de pacification,
Silencieux dans l’égalité méditative,
Et réalisant des prodiges de toutes sortes :
Les vivants le verront
Dans la vaste splendeur de sa magnificence.

23
Le voyant, ils formeront le souhait
De la bouddhéité et s’y appliqueront :
Adoptant sa cause de manière authentique
Ils finiront par obtenir ce qu’ils désirent.

24
Bien que cette vision
Soit immobile et non conceptuelle,
Elle fait cependant dans le monde
Apparaître d’immenses bienfaits.

25
« Ceci apparait dans mon propre esprit » :
Bien que les êtres ordinaires l’ignorent
La vue de cette image
Prend pour eux tout son sens.

26
Progressivement, par la grâce de cette vision
Ceux qui sont établis dans le [grand] véhicule,
Verront en eux-mêmes avec l’œil de la sagesse primordiale
Le corps de la réalité authentique.

27
Si la terre entière était débarrassée de ses lieux effrayants,
Si sa surface avait la belle clarté du lapis-lazuli, était lisse et splendide comme un joyau sans défauts,
Alors y brilleraient les résidents célestes, Indra et les formes divines.
Cependant la terre peu à peu perdant ces qualités, ceux-ci disparaîtraient.

28
Pour l’obtention véritable, une multitude d’hommes et de femmes adopteraient la générosité et les autres vertus, veilleraient à
leurs vœux, leurs attitudes particulières,
Et répandraient des fleurs avec l’esprit fervent de la sublime aspiration.
Pleins d’allégresse, les fils des vainqueurs font naître l’esprit d’éveil.

29
De même que sur la base immaculée de vaidurya
S’élèvent les reflets du corps d’Indra,
Sur la base pure de l’esprit des vivants
Brillent les reflets du corps du Seigneur des vainqueurs.

30
L’apparition ou la disparition des reflets chez les êtres,
Dépend de l’engagement de leur esprit, selon sa clarté ou son trouble.
A l’instar de la forme [d’Indra] apparue dans le monde,
Ces [reflets] ne doivent pas être vus comme existants ou disparus.

[Le tambour divin]

« Semblable au tambour divin » :

31
Par la force des actes blancs passés des dieux
Le son du tambour [du Dharma] résonne parmi eux,
Sans effort ni localisation,
Ni pensée, ni forme, ni conceptions.

32
Au son des mots « impermanence », « souffrance »,
« Absence de soi » et « pacification »,
Il exhorte toujours et encore
Les dieux inattentifs.

33
De même, le maître omniprésent, la parole du Bouddha
Sans efforts, sans localisation, etc..,
Pénètre les vivants sans aucune exception,
Et transmet le Dharma aux êtres fortunés.

34
De même que le tambour divin résonne chez les dieux
Du fait de leurs actions passées,
L’enseignement du Conquérant, bien qu’énoncé par lui,
Provient dans le monde des actes de chacun.

35
De même que le son du tambour, sans effort, sans localisation, sans corps et sans intention
Etablit la quiétude,
De même le Dharma dépourvu de ces quatre [entraves]1Effort, localisation, incarnation et intention
Etablit dans la paix.

36
De même que le son du tambour divin en les cités célestes, amène la bravoure
Qui pendant la bataille des passions, défait l’armée des demi-dieux et met fin à leurs jeux.
De même est énoncé au monde, surgissant notamment de la méditation sans forme,
Le mode de la voie inégalable qui éradique souffrances et passions et apaise les êtres.

Pourquoi fait-on référence ici au tambour du Dharma plutôt qu’aux cymbales divines ou autres [instruments], alors que ces dernières résonnent par la force des actes passés des dieux, et que leur son est agréable à l’oreille divine ? Parce que leurs qualités diffèrent sur quatre points de celles de la mélodie du Tathagata. Quels sont-ils ?

Elles sont limitées, non bénéfiques, n’apportent pas le bonheur, et ne conduisent pas à la délivrance.

Par son exhortation ininterrompue dans le temps des assemblées divines inattentives, le tambour du Dharma montre qu’il n’est pas limité.

En protégeant les dieux de la peur des demi-dieux et des assemblées hostiles, et en les amenant dans le domaine de l’attention, il montre qu’il est bénéfique.

Par l’examen de la jouissance des plaisirs inférieurs et l’établissement de la félicité joyeuse [issue] de la pratique des enseignements, il montre qu’il est bonheur.

En émettant le son de l’impermanence, de la souffrance, du vide et de l’absence de soi, pacifiant toute misère et toute hostilité, il conduit à la délivrance.

En bref, puisqu’il s’accorde à l’enseignement sous ses quatre aspects, le mandala de la mélodie du bouddha est le plus éminent.
Vient ensuite une stance sur le mandala de la mélodie du Bouddha.

37
Apportant bonheurs et bienfaits à toutes les destinées,
Munie des trois pouvoirs miraculeux,
La voix mélodieuse du Bouddha
Est de loin supérieure aux cymbales célestes.

Ces quatre aspects montrent définitivement [sa supériorité]. On les connaîtra en bref et dans l’ordre d’après ces quatre stances :

38
Le son puissant du tambour des domaines divins
N’atteint pas les oreilles des résidents de cette terre.
Mais dans le samsara, le son du tambour du Bouddha
S’étend jusqu’aux mondes souterrains.

39
Dix millions de cymbales divines résonnent chez les dieux
Pour attiser à l’extrême le brasier du désir.
L’unique voix mélodieuse de la compassion même
A pour but d’étouffer les feux de la souffrance.

40
Le son des cymbales divines, attirant et élégant,
Accroît parmi les dieux l’agitation d’esprit.
Les paroles du Tathagata, compassion en elles-mêmes,
Incitent au samadhi et à la réflexion.

41
En résumé, en quelque monde que ce soit,
Toute cause de bonheur, aux cieux comme sur terre,
Repose entièrement sur cette mélodie
Qui pénètre les mondes sans aucune exception.

Le déploiement magique du corps [du Bouddha] dans tous les domaines de mondes des dix directions sans exception, atteste des « manifestations supranormales prodigieuses ».

La pénétration et la connaissance des aspects de l’esprit qui révélent la profondeur de l’activité mentale des êtres sont « le prodige de la lecture des esprits ».

L’expression mélodieuse de la voix qui conseille et enseigne la voie de la sortie définitive, est « le prodige de l’instruction ».

Ainsi, bien qu’à l’instar de l’élément espace le mandala de la voixndu Bouddha soit omnipénétrant, continûement et sans obstacles, sa,mélodie n’est pas perçue partout et sous tous ses aspects. Afin d’expliquer qu’il ne s’agit pas là d’une déficience du cercle sans limites de la mélodie du Bouddha, il y a une stance sur les défaults personnels de ceux qu’elle n’atteint pas :

42
Ceux dont l’ouïe est altérée
Ne perçoivent pas les sons subtils
Qui tous ne sont pas entendus,
Même par l’oreille des dieux.

43
De même, relevant du domaine d’expérience
De la fine sagesse primordiale,
Le Dharma suprême et subtil
Ne parvient qu’aux oreilles de ceux dont l’esprit est sans perturbations.

[Les nuages]

« Semblable aux nuages »

44
Les nuages de l’été,
Sans effort sur la terre
Sans cesse s’abattent en trombes d’eau,
Et sont la cause d’abondantes récoltes.

45
Des nuages de la compassion,
La pluie du Dharma excellent du Vainqueur
Tombe de même sans élaborations,
Cause pour les vivants de moissons de vertus.

46
De même qu’en ce monde engagé sur le chemin de l’harmonie
Les nuages engendrés par le vent se répandent en pluies,
Afin d’accroître la vertu des vivants, poussés par le vent de l’amour,
Les nuages du Bouddha versent la pluie de l’excellent Dharma.

47
Grand amour et connaissance
Siégeant au centre de l’espace, inaltérés par l’éphémère et l’immuable,
Les nuages du Roi des Vainqueurs dont l’essence est l’eau claire des samadhis et dharanis,
Sont la cause en ce monde de moissons de vertus.

« La variété des réceptacles » :

48
L’eau tombée des nuages
Fraîche, agréable, douce et légère,
Qui pénètre la terre salée ou bien des sols divers
Acquiert ainsi de nombreuses saveurs.

49
De même, du cœur des nuages d’immense compassion,
La pluie du noble et octuple sentier s’écoulant sur les êtres,
Adopte autant de goûts
Qu’il y a d’états d’esprit.

« L’engagement indépendant »

50
Ceux qui ont foi en le suprême véhicule,
Ceux qui sont neutres et ceux qui y sont hostiles,
Ressemblent aux trois groupes
Des hommes, des paons et des esprits avides.

51
Les hommes et les paons qui ne savent voler endurent l’absence de nuages de la fin du printemps,
Alors que les esprits avides pâtissent des fortes pluies d’été.
Selon que des nuées de la compassion s’écoulent ou pas les eaux de la doctrine,
Souffrent en ce monde comme dans cet exemple, ceux qui aspirent à la doctrine et ceux qui s’y opposent.

52
Quand ils s’abattent sur terre en grosses gouttes, grêle, ou même foudre,
Les nuages ne préviennent pas et ne s’occupent pas des petits insectes ou des êtres qui se trouvent en montagne.
De même, les méthodes, vastes ou subtils, des nuées de l’amour et de la connaissance,
Ne dépendent jamais des perturbations ou de la propension à la vision d’un soi.

« L’extinction des feux de la souffrance »

53
Dans le cycle sans début des naissances et des morts, il y a cinq chemins2Dieux et demi-dieux, hommes, animaux, esprits avides, êtres des enfers;
De même qu’il n’y a pas de bonnes odeurs parmi les immondices, sur ces cinq voies il n’y a pas de bonheur.
Cette souffrance permanente née du contact du feu, des armes, du sel et du reste,
S’apaise quand se déverse des nuages de l’amour, les abondantes pluies du sublime Dharma.

54
Puisqu’ils comprennent que les dieux souffrent de la mort, de la transmigration, et les hommes de leur soif de plaisirs,
Ceux qui font preuve de discernement n’aspirent pas au suprême pouvoir des hommes et des dieux :
Suivant avec ferveur la parole du Tathagata, munis de la connaissance supérieure,
Ils voient clairement que « ceci est la souffrance, ceci en est la cause et ceci est la cessation ! »

55
La maladie doit être connue, sa cause éliminée,
La santé retrouvée et le remède absorbé.
De même, la souffrance doit être connue, sa cause éliminée,
Sa cessation expérimentée et la voie empruntée.

[Semblable au grand Brahma]

56
Tout comme Brahma sans quitter son palais,

57
Se montre sans effort dans tous les domaines divins,
Le Puissant, sans quitter le corps de réalité et sans effort,
Montre ses émanations dans tous les domaines aux êtres fortunés.

58
Les dieux qui voient Brahma pénétrer le domaine du désir sans quitter son palais infini,
Ont la vision qui fait abandonner le désir des objets [de plaisir].
De même, les fortunés qui voient le Sugata présent en tous les mondes sans s’écarter du corps de réalité,
Ont la vision qui élimine à jamais toutes leurs impuretés.

59
Par ses propres souhaits antérieurs
Et par le pouvoir de la vertu des dieux,
Brahma apparaît sans effort.
Tel est le corps d’émanation né de lui-même.

Invisible

60
La transmigration, l’entrée dans la matrice, la naissance, l’arrivée au palais du père,
La vie de plaisirs, la vie solitaire, le triomphe sur Mara,
L’obtention du grand éveil, et la révélation de la voie vers la cité de la paix :
Après avoir montré cela, le Conquérant fut invisible pour les infortunés.

Tel le soleil

61
Tandis que brûle le soleil,
Lotus et autres s’épanouissent, mais la fleur Kumuda se referme.
Les qualités d’éclosion et les défauts du repli des fleurs nées de l’eau,
Le soleil n’y pense pas, comme le soleil des Nobles.

Le domaine des vivants est de deux sortes : Les disciples et les non-disciples.

Concernant les disciples : Ils sont comme un lotus, un récipient d’eau claire.

62
Le soleil sans discrimination,
Rayonnant de sa propre lumière,
Fait simultanément éclore le lotus
Et croître d’autres [plantes].

63
De même, le soleil du Tathagata,
La lumière rayonnante de l’excellent Dharma,
Guide sans distinction
Les êtres à éduquer qui sont tels des lotus.

64
Par les corps de formes et de réalité,
Surgit dans l’espace essentiel de l’éveil
Le soleil omniscient projette sur les destinées
Les rayons lumineux de la sagesse primordiale.

65
C’est pourquoi, sur les êtres à éduquer
Pareils à des récipients d’eau,
Apparaissent simultanément les reflets innombrables
Du soleil du Sugata.

Ainsi dépourvus de concepts, les bouddhas sont tel un soleil dans leur manière de conseiller et de guider les trois classes de vivants.

66
A jamais omniprésent
Au centre de l’espace, de l’étendue de la réalité,
Le soleil du Bouddha inonde comme il convient
La montagne des disciples.

67
Au lever du soleil, par milliers, de prodigieux rayons
Se déversent peu à peu sur l’ensemble des mondes,
Illuminant les hautes, moyennes et basses montagnes.
De même, peu à peu, le soleil du vainqueur inonde tous les êtres.

La supériorité du cercle de lumière [du Bouddha]

68
Le soleil ne rayonne pas au centre de l’espace de tous les domaines
Ni même ne révèle le sens du connaissable dans les épaisseurs sombres de la méconnaissance.
Celui qui incarne la compassion, par maintes lumières irradiant de nombreuses couleurs,
Montre le sens du connaissable aux vivants qu’il éclaire.

69
Quand le Bouddha se rend dans les villages, les aveugles voient,
Et par cette vision expérimentent le mode de la libération de toutes choses insensées.
Ceux qui sont aveuglés par l’ignorance, tombés dans l’océan du cycle et pris dans les ténèbres des vues,
Découvrent ce qu’ils ne voyaient pas, l’intelligence illuminée par la lumière du soleil du Bouddha.

Semblable au joyau qui exauce les souhaits

70
La gemme à souhaits,
Sans discursivité et simultanément,
Exauce les désirs de ceux
Qui sont présents dans son domaine d’action.

71
Pareillement, s’en remettant au joyau d’abondance du bouddha,
Les vivants d’inclinations diverses
Entendent des enseignements variés,
Alors que le Bouddha ne les a pas pensés.

72
De même que la gemme à souhaits sans élaborations
Procure aux autres sans effort les richesses désirées,
Le Puissant sans effort de manière adéquate,
Demeurent pour le bien d’autrui aussi longtemps que dure le monde.

L’apparition d’un tathagata est rare

73
Sous terre, dans l’océan, pour qui le désire en ce monde
Il est compliqué de trouver un excellent joyau.
On saura que de même, pour l’infortuné dont l’esprit est la proie des passions,
La vue du Sugata est difficile à obtenir.

Semblable au son de l’écho

74
De même que le son de l’écho,
Qui apparait de sa perception par autrui,
75
Sans concepts ni fabrications,
Est sans localisation intérieure ou extérieure,
De même, la parole du Tathagata,
Qui apparait de sa perception par autrui,
Sans concepts ni fabrications,
Est sans localisation intérieure ou extérieure.

Semblable à l’espace

76
Immatériel , sans apparence,
Inobservable, sans support,
77
Au-delà du visible,
Indescriptible et sans forme,
L’espace est pourtant vu avec un « haut » et un « bas »,
Mais il n’est pas ainsi.
Bien qu’on puisse de même tout voir dans le Bouddha,
Il n’est pas ainsi.

Semblable à la terre

78
Tout ce qui naît de la terre,
En appui sur la terre,
79
Croît, se renforce et s’épanouit sans pensées.
De même, sur la terre du parfait Bouddha,
En appui sur l’absence de pensée,
Croissent sans exception
Les racines de bien des vivants.

[Résumé du sens de ces analogies]

80
Puisqu’on ne voit pas d’actes
Accomplis sans efforts,
Les neuf analogies ont été enseignées
Afin de trancher les doutes des disciples.

81
Ces neuf analogies
Ont été présentés en détail,
Dans le soutra dont le nom même
Expose le propos3ārya-sarvabuddha-viṣayāvatāra-jñānālokālaṃkāra (L’Ornement des apparences de la sagesse primordiale qui pénètre le domaine de tous les bouddhas).

82
Ornés de la vaste lumière
De la connaissance issue de l’écoute,
Les sages pénétreront vite
Et complètement le champ d’expérience du Bouddha.

83
Sur ce point, on tiendra pour certain
Le sens essentiel des neufs analogies,
84
Le reflet d’Indra sur le lapis-lazuli
Et les autres :
Manifestation, parole, présence,
Emanation, irradiation de sagesse primordiale,
Secrets du corps, de la parole et de l’esprit,
Obtention de la nature compatissante.

85
Le flux de tous les efforts complètement apaisé,
L’esprit libre de conceptions
Est tel le reflet d’Indra
Qui apparait sur le lapis-lazuli immaculé, etc…

86
La thèse, l’apaisement des efforts,
La preuve logique, l’esprit libre de conceptions,
Et les exemples, l’image d’Indra et les autres,
Visent à établir les modalités de cette nature.

87
Le sens de ce chapitre est le suivant :
Les neufs attributs, la manifestation et le reste,
Montrent que le Maître libre des naissances et des morts
Se manifeste sans efforts.

Sur ce point, quatre stances résument les analogies :

88
Ce qui comme Indra, le tambour, les nuages,
Brahma, le soleil et le roi des joyaux d’abondance,
Comme l’écho, l’espace, et la terre, œuvre sans effort pour autrui
Tant que dure le cycle, est connu des yogis [accomplis].

89
Semblable au reflet du seigneur des dieux sur un joyau,
Instruisant à merveille tel le tambour divin,
Nuée de connaissance et d’amour souveraine et diffuse
Le maître imprègne l’infinité des vivants jusqu’au sommet de l’existence.

90
Comme Brahma, sans quitter son domaine sans taches,
Il se révèle par des émanations variées.
Comme un soleil, sa sagesse primordiale répand sa lumière,
Et son esprit pur et précieux est telle une gemme à souhaits.

91
Semblable à l’écho, la parole du Vainqueur est sans mots ;
Semblable à l’espace, son corps pénètre tout, est dépourvu de forme
et éternel;
Semblable à la terre, la terre de Bouddha est le fondement tous les qualités blanches,
Qui sous tous leurs aspects sont la médecine des vivants.

D’après ces analogies, les bouddhas victorieux ne sont jamais soumis à la naissance et à la cessation. Dès lors, pourquoi les voit-on apparaître, disparaître, [déployer] l’activité éveillée, enseigner spontanément et sans relâche à tous les vivants ?

92
La pureté qui est la cause
De la vision du Bouddha
En l’esprit semblable au pur lapis-lazuli,
Est le pouvoir accru de la foi irréversible.

93
Puisque que la vertu est produite et détruite,
L’image du Bouddha est produite et détruite.
Tout comme Indra,
Le corps de réalité du puissant n’est ni produit, ni détruit.

94
Ainsi, sans efforts,
A partir du corps de réalité sans naissance ni cessation,
Il manifeste son activité,
Enseigne tant que dure le cycle.

95
Par les analogies qui suivent,
Et dans cet ordre, le sens est résumé :
Les qualités extraordinaires de celle qui précède
Sont exprimées par celles qui font défaut dans la suivante.

96
Le Bouddha est tel un reflet,
Mais différent car le reflet n’a pas sa mélodie ;
Il est comme le tambour des dieux,
Mais différent car le tambour n’agit pas pour le bien en tous lieux.

97
Il est semblable à un grand nuage
Mais différent car le nuage n’élimine pas les graines inutiles.
Il est comme le grand Brahma
Mais différent puisque le grand Brahma ne mène jamais à la parfaite maturité.

98
Il est comme le soleil
Mais différent car le soleil ne vainc pas les ténèbres.
Il est tel le joyau d’abondance
Mais différent car il est plus facile de trouver un joyau.

99
Il est comme l’écho,
Mais différent parce que l’écho dépend de conditions.
Il est semblable à l’espace,
Mais différent car l’espace n’est pas le fondement de la vertu.

100
Étant le support et la base des perfections
Mondaines et supramondaines,
Pour tous les êtres sans exception,
Il est semblable au mandala terrestre.

101
Car sur le support de l’éveil du Bouddha
S’élèvent la voie supramondaine,
La voie des actes vertueux, la méditation,
Les incommensurables et le sans-forme.

102
« L’activité éveillée » : quatrième chapitre du Traité de la continuité sublime du grand véhicule, analyse de la filiation des [trois] joyaux.